5 octobre 2016/ CHARLIE HEBDO N° 1263/5
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À LA MANIVELLE
GÉRARD BIARD
UN ASSASSINAT
,
CONTROVERSE
Il y a deme
façons de rapporter une
information dans la presse. On
peut rester neutre et se contenter
d'énoncer Ies faits-; ou au contraire
y
ajouter un point de vue. Mais même en
restant apparemment neutre, on n'est
pas
forcément honnête. Le traitement
média-
tique de l'assassinat de l'écrivain
jorda-
nien Nahed Hattar, abattu le 25
septembre
sur les marches du tribunal d'Amman
alors qu'il se rendait à l'audience
de son
procès pour blasphème, est à ce titre
emblématique et révèle la veulerie
plus ou
moins sournoise dont font preuve toujours
plus de journalistes face au
totalitarisme
religieux
et à ses manifestations diverses.
Résumons. Athée revendiqué, Nahed
Hattar a publié en août dernier sur
sa
page Facebook un dessin satirique,
réalisé
par un inconnu, titré «Seigneur des
-Daechtstes»
et représentant un djihadiste
de l'Etat islamique,
vraisemblablement au
paradis d'Allah, entouré de deux
vierges
et réclamant à un dieu qu'il tient
pour un
domestique « du vin, des noix de cajou
et"
quelqu'un pour venir faire le ménage
dans
la chambre». Couvert d'injures et
menacé
de mort, il a été arrêté et poursuivi
pour
« incitation aux dissensions
confession':
nelles» et
«insulte à l'islam», sur demande
expresse du
Premier ministre jordanien,
qui partage
visiblement l'avis des djiha-
distes :
qui moque Daech moque Dieu.
Le motif de
son exécution à bout
portant ne
fait par conséquent aucun
doute:
c'était un vil blasphémateur.
Pourtant,
les portraits rapides dressés
par les
médias français le lendemain de
son
assassinat tentaient pour la plupart
de suggérer
qu'il était d'abord bien
autre
chose. Un journaliste «chrétien»,
défenseur
acharné
Fanatisme de Bachar el-Assad,
proche
du Hezbollah,
religieux
ou militant de la cause
palestinienne
et surtout, ,
intoxication
surtout, un intellectuel
alimentaire
1 «controversé», comme
l'a
souligné deux
fois
- au cas où le
lecteur
aurait été distrait - Libération
Bref, ces
biographies lapidaires sous-
entendaient
lourdement que, outre le fait
que Nahed
Hattar les avaient sûrement
bien
cherchées, ses trois balles dans la
tête, son
assassinat pourrait avoir d'autres
mobiles que
le fanatisme religieux.
Les journalistes qui ont rédigé ces
portraits semblent déconnectés du
monde dans lequel ils évoluent - ce
qui
est
étonnant puisqu'ils ont la truffe en
•
permanence
collée au cul de Twitter et de
Facebook.
Ceux qui soutiennent Bachar ou
•
les
Palestiniens ne se font pas systémati-
quement
pourrir et condamner à mort sur
•
les réseaux
sociaux. Ceux qui publient ou
signent un
dessin jugé «blasphématoire»,
•
voire
«choquant» ou «pas drôle», si. C'est
le cœur du
problème, "soigneusement •
•
contourné
ici. Nahed Hattar avait peut-
être de
mauvaises fréquentations et sans
•
doute pas mal d'ennemis politiques.
Mais
il a été assassiné, comme tant
d'autres,
8
,
,
, pour une satire sur
l'islam. Point. Insinuer le contraire est mensonger. Autant dire
carrément qu'il a glissé dans l'escalier qui le conduisait
au tribunal.
Quèlques jours après le meurtre de Nahed Hattar, le
caricaturiste marocain Khalid Gueddar a demandé la protection de la police: il
a aussi reçu de très expli¬cites menaces - «votre sort, c'est la mort et
l'égorgement, vous êtes l'ennemi de Dieu» _ pour avoir publié le même dessin
sur F'acebook. Que lira-t-on, qu'entendra¬t-on s'il s'ajoute sur la liste sans
fin des victimes du fanatisme islaxniste? Qu'il avait mangé des moules pas
fraîches la veille de sa mort? Que lui aussi était «controversé», souligné
trois fois?
C'est une chose de ne surtout pas vouloir faire d' «
amalgames)) dans un contexte où le débat sur l'islam est sorti de la sphère
rationnelle - désormais, il hystérise ou il tétanise. (j'en est une autre de
refuser de nommer clairement des tueurs et de reconnaître qu'ils assassinent au
nom d'une idéologie politico-religieuse totalitaire qui séduit de plus en plus
de
"soldats », partout dans le monde. C'est permettre
qu'ils tuent encore et encore.
CaNote du 17 octobre:
m'a pris un peu de temps pour comprendre le couverture de Charlie Hebdo cette semaine.
It took me awhile to understand the Cover of Charlie Hebdo this week.
Apparement Zemmour a dit qu'il respectait les Kamikazes suicidaires du "Califat" de l'Etat Islamique--dans un entretien la semaine derniere--et donc Coco et L'Equipe de Charlie, qui respectent l'aspet Provokateur tout de meme, lui disent, "vas-y, soyez un Homme et suicide-toi comme les Kamikazes suicidaires de ISIS"
Apparently Zemmour said that he respected the suicide bombers of the "Caliphate" of the Islamic State-in an Interview last week-and Coco and the satirists at Charlie Hebdo, while respecting the provocatve aspect of things, say to him, "go ahead, be a man and suicide yourself like the suicide bombers of ISIS"
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